Y a encore des amis sincères Les Durand font tout pour me plaire Ils me téléphonent souvent "Rapplique, vieux frangin, on t'attend !" Ils habitent la banlieue proche Alors, pour une petite bamboche J' réponds "J'arrive, mes bons amis !" Mais j'habite à l'autre coin de Paris
Il faut partir la veille Et se lever de bon matin Il faut partir la veille Pour arriver le lendemain
Par le métro, tout d'abord J' dois m' rendre à la Gare du Nord Je change à la République Cinq, six couloirs en oblique Je file sur Saint-Lazare En direction Place Balard À Concorde, c'est la station Où j' rechange de direction
Je pousse jusqu'à Vincennes L'autobus à gazogène Vient d' partir archibondé Mais y faut pas désespérer Trois autres filent par petits bonds Le quatrième, c'est le bon Je l' prends. Hélas, ce retard Me fait rater l'autocar
Quand on rate celui d' midi Faut attendre cinq heures et demie Je l'ai, mais là, je voyage Plié dans le porte-bagages J'arrive pour leur dire, narquois "J' vous épate, c'est déjà moi !" Le temps d' leur serrer la main Et j' cavale reprendre mon train
Pour aller à Marseille C'est pas plus long qu' chez mes copains Car faut partir la veille Pour arriver le lendemain
Je vais vous faire une confidence : En amour, moi, je n'ai pas d' chance J' tombe toujours sur des phénomènes T'nez, en ce moment, j'ai une sirène C'est une refoulée intégrale Une compliquée, une cérébrale Pour lui donner le grand frisson Faut pas du travail à façon
Il faut partir la veille Et se lever de bon matin Il faut partir la veille Pour arriver le lendemain
Dans tout son appartement Y a des éclairages savants Des projections bleu cheviotte Sur les bains et sur la flotte Et des musiques en sourdine Qui lui jouent des cavatines Et des brûle-parfums grandioses Où brûle de l'essence de rose
Dans cette ambiance qui lui plaît Elle se trouble un tantinet, Pour cette imaginative Faut que j' fasse des danses lascives Vêtu d'une façon simplette Mon slip, mes fixe-chaussettes, Deux heures de ce festival Après, faut qu' je sois brutal
Je bondis, j' lui arrache tout Je lui mords la peau des g'noux Je la plie, j' la tords, joyeuse En rond dans la lessiveuse Je l'en ressors et j' l'y remets quatre fois La cinquième, elle est à moi Elle m'appelle son gourgandin Et ça y est, elle vibre enfin
Y en a pas deux pareilles Chipez-la-moi, j' serai pas jaloux Car je dois partir la veille Et quand j'arrive, c'est sur les g'noux